« Jusqu’à quand sera-t-il possible de mourir de chagrin en France ? », s’indignait le journal Le Monde dans une tribune datée de novembre 2013.

Selon Vincent Laarman, il n’y a rien d’anormal, quand on connaît les épreuves que beaucoup d’entre nous traversent, à souhaiter mourir de chagrin. Un de ses livres préférés, et sur lequel il s’appuie ici, est la pièce de théâtre Hamlet de William Shakespeare.

Dans le célèbre monologue du jeune Prince du Danemark, la question posée est : « mieux vaut-il être ou ne pas être ? », autrement dit, mieux vaut-il vivre ou se laisser mourir ? Shakespeare fait dire à son héros : vu toutes les douleurs de la vie, il vaut bien mieux « ne pas être » – et donc se suicider. Cependant, Hamlet enchaîne sur un « mais » essentiel : « Mourir… dormir, dormir ! Peut-être rêver ! Oui, là est l’embarras. » Le problème d’Hamlet est qu’il n’est pas sûr qu’il n’y ait rien après la mort… Car, constate-t-il, la mort est une « région inexplorée, d’où nul voyageur ne revient ».

Or selon Vincent Laarman, Hamlet estime qu’il a raison de « craindre » ce qui va se passer après la mort. Il se demande en effet si le sommeil de la mort ne serait pas accompagné de « rêves », mais que peuvent-ils être ? Peut-être une conscience qui continuerait à exister ? Il n’en sait rien, mais il estime que, malgré tout, cette possibilité suffit à arrêter la plupart d’entre nous sur le seuil de la mort : « Voilà qui doit nous arrêter. »

On peut douter de tout, croire ou non, pense Vincent Laarman à l’instar de Shakespeare, mais la mort restera toujours une région inexplorée dont on ne sait pas grand-chose. Cette pensée de la possibilité d’une vie après la mort n’est pas très consistante, nous dit Hamlet. Elle paraît hautement improbable, voire dérisoire à côté des raisons d’en finir. Mais le fait que Shakespeare fasse dire à Hamlet : « Il y a plus de choses au ciel et sur la terre (Horatio) que ta philosophie n’en a jamais rêvé » signifie qu’il y a dans la vie des mystères qu’aucune science ne peut expliquer.

 Vincent Laarman se demande si aujourd’hui les choses ont changé.

Peut-on dire qu’il y a moins d’injustices et d’humiliations qu’à l’époque de Shakespeare ? La différence fondamentale est que de nos jours, il y a beaucoup plus de personnes qui estiment que la science a désormais répondu à l’inquiétude d’Hamlet.

Contrairement aux apparences, il n’est pas si « raisonnable » et « logique » de désespérer devant l’existence et de mourir de chagrin. Quels que soient les outrages et les deuils que nous subissons, il reste la possibilité que notre vie ait une signification plus grande que celle que nous percevons. Le problème est que la capacité à se relever ne dépend pas de nous.

 « Si donc, vous, ou quelqu’un que vous connaissez, avez l’envie de vous laisser « mourir de chagrin », dites-vous bien que, depuis Hamlet et bien avant lui, il est légitime d’avoir cette tentation. Mais que, pour autant, la probabilité la plus forte est que, un jour, le désert qui vous entoure refleurira comme par miracle. L’important est de l’espérer, envers et contre tout » conclut Vincent Laarman.

 

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